C’est à Saltillo que j’arrive pour mon avant dernière étape. 
L’Alliance Française de Saltillo me met en contact avec L’école du Sarape La Favorita, avec l’université d’Arts Plastiques et le Musée d’Arts Graphiques de la ville. Je vais y travailler du 23 mai au 1er Juin 2019. 

C’est avec une sortie dans le désert que nous commençons notre collaboration. Celle-ci nous permet de nous rencontrer, dans nos personnalités et intérêts ainsi que de trouver des inspirations et problématiques locales à soulever.
Il y a ici des pétroglyphes (dessins gravés dans la pierre) datant de plusieurs milliers d’années. Ce sont les témoins d’une activité humaine bien plus vieille que nous. L’énergie particulière de ce lieu, les éléments naturels extrêmes qui constituent le paysage nous invitent à réaliser un inventaire sensible et respectueux de la zone.
Croquis, relevés de terre et de minéraux, de végétaux, d’épines, frottages et photos constituent la base qui va nous servir à créer nos œuvres pour cette micro-résidence.
Nous mettons en place un processus jouant sur une accumulation quasi systématique : d’une pierre on extrait un frottage -une marque au graphite déjà subjective et portant en elle le flou induit par le procédé- puis on redessine cette marque, on scanne cette interprétation et on la retouche pour en extraire un motif, qui sera une matrice de linogravure, on imprime celle-ci sur papier avec différentes encres ou encore, on l’interprète en tissage.
L’idée est de répéter des gestes et manipulations pour aller au-delà de la première lecture et impression du désert, en ajoutant la sensibilité et le vocabulaire formel à chaque technique artisanale (telle que la gravure et le tissage de Sarape)

Nous faisons également des recherches autour du geste d’envelopper des pierres dans du tissu. Telle une mère qui emmaillote son nouveau-né, ou telle une fille qui couvre sa grand-mère qui a froid, ce geste du prendre soin nous a permis d’établir une connexion avec cette terre, avec “ces grands-mères les pierres” comme on le dit en espagnol au Mexique, et avec notre condition d’humains, en contact permanent avec le textile. En effet, les gestes de couvrir et de protéger le corps de tissu sont présents à toutes les étapes de notre vie, et ce depuis toujours. L’universalité de cette relation résonne alors avec l’âge du lieu (celui de ces pierres et de ces gravures). Ce geste se décline selon la taille des pierres, seule ou à plusieurs et selon différents médiums : installations, photographies, performance filmée.

Enfin, un grand travail de teinture naturelle prend place à la Escuela del Sarape. Les plantes et pigments sont ceux que l’on trouve autour d’ici. Vernaculaires, les couleurs se déclinent en milles teintes. Les recettes préhispaniques sont inchangées, d’autres sont réinventées, selon les doses d’ingrédients que l’on décide d’ajouter sur le moment. Plonger la laine dans ces cuves de teinture, c’est aussi répéter les mêmes gestes ancestraux des artisan.e.s.
Les techniques du Sarape sont aussi revisitées. En effet, les Sarape traditionnels sont des tissages colorés présentant un fond de rayures de couleurs dégradées et de motifs géométriques qui se déclinent au centre et en bordure du tissage. Les dégradés de couleurs vives illustrent traditionnellement les couchers de soleil ardant de Saltillo. Ici les couleurs sont celles du désert de Coahuila. Inspiré de vues aériennes enregistrées lors d’une performance, le Sarape tisse le lien entre le travail graphique (motif), celui de teinture et le travail in situ dans le désert.

Ateliers au Taller de Grabado et à la Escuela del Sarape, 
Sorties dans le desert del Gabillero, conférences et rencontres avec les élèves de l’Alliance Française de Saltillo

TRAMAS
(trames)

Exposition présentée du 30 Mai au 2 Juin 2019 au Museo de Artes Graficas de Saltillo.